Un texte écrit pour Kaleïdoplumes mais aussi et surtout pour Elle...
L'AMIE D'ENFANCE
Elles avaient fait connaissance alors qu'elles n'étaient que deux
adolescentes de 15 et 16 ans. Elle se souvient de leur premier
fou-rire piqué ensemble, et aussi des nombreux autres qui avaient
suivi. Le courant avait passé tout de suite entre elles, et pourtant
elles étaient très différentes. L'une était timide et sage,
l'autre était audacieuse et un brin provocatrice.
Elle se souvient des mots prononcés par son amie lors de ce fou-rire
mémorable :
- Quelque chose me dit que nous n'allons pas en rester là !
Elle avait raison, car cinquante ans après, elles se fréquentaient
toujours avec autant de plaisir.
Aujourd'hui encore, elles se sont donné rendez-vous dans la galerie
marchande de la Grande surface. Elles se retrouvent toujours vers le
manège, c'est une habitude depuis des années. Son amie est déjà
là, plus ponctuelle qu'elle.
Après s'être saluées et embrassées, elles se dirigent vers la
cafétéria, il est midi. Elles prennent le menu « entrées et
desserts », ce sont surtout les desserts qui les intéressent,
elles sont très gourmandes. Il y a du monde à la caisse, son amie
râle, elle n'a jamais été très patiente, du moins pas dans les
files d'attente. Elle, elle pourrait attendre des heures sans
broncher. Après avoir choisi leurs plats, elles s'installent enfin à
une table près des baies vitrées, un peu à l'écart, pour pouvoir
discuter tranquillement.
Elles se racontent alors chacune à leur tour leurs dernières
semaines, leurs sorties, leurs rencontres mais aussi se confient
leurs tracas, leurs soucis, leurs inquiétudes.
Elles vont ensuite faire un tour dans le magasin. Elles s'arrêtent
bien sûr au rayon des livres, passionnées qu'elles sont toutes deux
de lecture. Ensuite elles font un petit tour au rayon vêtements, au
rayon des pulls, elles trouvent toujours un petit pull à acheter. Et
enfin, elles se rendent aux caisses pour payer.
Elles vont encore faire une petite pause le temps de boire un café,
et de retarder ainsi de quelques instants le moment de se séparer.
Après, le rituel est que l'une accompagne l'autre à sa voiture, et
que la discussion reprenne encore un moment dans le véhicule. Elles
ont encore des choses à se dire.
Et enfin, elles se quittent à regret, se promettant de se revoir
bientôt et faisant promettre à l'autre de prendre soin de sa santé
et d'être prudente sur la route du retour.
Elle regarde partir son amie. Elle remarque qu'elle a le dos un peu plus voûté que la dernière fois, qu'elle claudique aussi
davantage, elle ne lui a pas trouvé très bonne mine non plus.
- Eh oui, on ne rajeunit pas, lui a dit cette dernière avant de
partir. Cela fait râler mais c'est la vie, il faut l'accepter. De
toute façon nous n'avons pas le choix, notre corps ne nous obéit
plus, il n'en fait qu'à sa tête, ne fait-il pas : « cric,
crac, croc », il vaut mieux en rire, tu ne crois pas ?...
Elle était très philosophe son amie...
Je reprends ici le commentaire que j'ai déposé sur Kaléïdoplumes :
RépondreSupprimerJe me suis un peu douté que tu parlais « d'elle ». C'est une très belle évocation de votre amitié partagée en relatant ainsi l'ordinaire de vos rencontres si riches et animées et surtout habitées d'une affection qui transparaît à chaque ligne.
Une manière simple et forte de parler de ces confidences qui durent et se renouvellent, comme si on ne pouvait se séparer.
C'est touchant. On s'y reconnaît chacun dans des souvenirs semblables.
C'est ce qui fait la force de ton texte.
Merci de déposer ton commentaire également ici, Alain.
SupprimerOui, il n'y a pas besoin d'extraordinaire pour que les choses soient belles. Et l'ordinaire de nos rencontres était riche et animé, comme tu le dis. J'aurais aimé que cela continue encore quelques années, elle n'était pas bien âgée pour partir déjà, elle va me manquer. Mais je sais qu'elle sera toujours à mes côtés tant que je continuerai à la faire vivre par mes mots et mes écrits relatant les moments partagés avec elle. Encore merci Alain.
Apparemment j'ai encore raté un article...
RépondreSupprimerJe ne laisserai qu'un commentaire ici puisque c'est le même sujet.
Si j'ai bien compris tu aurais perdu une amie d'enfance de façon soudaine ???
Malheureusement, nous arrivons dans une mauvaise tranche d'âge, elle avait raison ton amie quand elle disait : "De toute façon nous n'avons pas le choix, notre corps ne nous obéit plus, il n'en fait qu'à sa tête".
Je t'adresse mes sincères condoléances, courage Françoise !!!
Oui, nous sommes dans une tranche d'âge où hélas, nos amis, nos parents, les gens que nous aimons, disparaissent et cela nous fait prendre conscience que le temps de notre vie s'écourte, c'est ainsi. Profitons des bons moments et des personnes que nous aimons pour ne pas avoir de regrets.
SupprimerMon amie de toujours est partie il y a douze jours maintenant alors que nous avions échangé la veille et qu'elle m'avait dit être rassurée vu le résultat de son dernier examen. Elle m'aurait dit : c'était mon heure...
Merci de tes mots, Gitantroubadour, et de ta présence.
Ce n'est qu'en lisant le commentaire de Gitantroubadour que j'ai compris que le départ était définitif et irréversible. Je comprends ta tristesse. Tu avais la chance de voir et revoir une amie d'enfance, ce qui est rare car souvent les études et la Vie dessinent ces amitiés en pointillés. Le souvenir reste là, au fond de toi, pour t'apporter la chaleur de tous ces instants partagés.
RépondreSupprimerOui, Chinou, mon amie s'est éteinte le 15 octobre. J'ai perdu une grande amie, une amie de toujours. Nous menions une vie très différente mais cela ne nous empêchait pas de nous apprécier, nous nous apportions quelque chose que nous ne possédions pas, c'était un enrichissement mutuel. Elle va me manquer, elle me manque déjà... Oui, le souvenir reste là.
SupprimerMerci Chinou ♥
La tristesse ressentie
RépondreSupprimerest souvent à la hauteur des joies vécues
alors ne penser qu'à tous ces bon moments que vous avez passé ensemble
et qui ont été si riches,
tout l'extraordinaire d'une vie ordinaire
comme tu le racontes si bien dans ce texte
Merci de t'être arrêté un instant ici, Pascal, et d'avoir déposé ces mots.
SupprimerOui, penser aux bons moments passés ensemble, cela aide un peu.
L'extraordinaire d'une vie ordinaire, cela aurait pu être le titre de ce billet.
Bonne soirée, et encore merci.
Votre texte est à la fois beau et émouvant. Je vous présente mes sincères condoléances. Courage.
RépondreSupprimerMerci à vous, Mme Chapeau.
SupprimerJolie ode à ton amie d’enfance.
RépondreSupprimerMerci Eveline.
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